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dimanche 8 février 2009

La classe selon Chabrol

Salle de conférence de presse, 20h30. Chabrol est seul sur le podium, face à une maigre poignée de journalistes. Il vient de jouer les clowns octogénaires devant les photographes, et ça a l'air de l'enchanter. Ce matin encore la salle était pleine à craquer pour Sturm, hier c'était la folie Kate Winslet venue présenter The Reader, on pouvait à peine rentrer. Il a pas l'air de s'en offusquer le réalisateur venu chercher son prix hommage, 50 ans après avoir gagné ici à Berlin avec "Les cousins". Pas de belle actrice sexy pour l'encadrer, pas d'acteur ténébreux, pas d'appât. Seulement ce petit bonhomme en imper, comme sorti de ses propres films, un peu voûté mais avec des yeux ronds comme des billes qu'il écarquille avec délice.
Hier Alexandra Lamy avait un parterre de 200 personnes pour écouter ses poncifs sur "accepter un enfant différent" entrecoupés de gloussements. Moi je préfère les petites blagues bien senties, les réponses attentives, le verbe précis de "Monsieur Chabrol". "Je ne me suis jamais préoccupé de ce problème de carrière. J'ai essayé, en me cachant le plus possible - j'ai honte - de fabriquer une œuvre. Cela n'a pas de rapport avec la carrière. J'ai même du parfois montrer mon derrière, pour continuer cette œuvre, j'ai fait des films honteux." Ou "L'image de Bellamy [son dernier film] est une espèce de Commissaire Maigret dont la femme ne passerait pas son temps à faire des fricandeaux à l'oseille, et cela fait une grosse différence. C'est ce que je reproche à Maigret, ce manque de sensualité". Ou encore "Je crois que les festivals sont faits pour aider les jeunes alors que beaucoup de festivals pensent que cela consiste à honorer les vieilles gloires. Mais ça n'est pas vrai. Je suis assez triste quand je vois tous ces vieux bonshommes, surtout à Cannes, c'est comme si il y avait un numerus clausus. Ce sont toujours les mêmes. Il faut qu'on ait des films de jeunes. Je pense qu'à partir de 30 films il ne faudrait plus pouvoir être en compétition". Chabrol devise un peu sur le poids de Depardieu (son Bellamy), les bouffes qu'ils font sur les tournages, la joie totale et désormais sans trac d'être en tournage, l'attention qu'il porte à déjouer les traits caricaturaux de ses personnages. Puis il se lève, et descend au milieu des journalistes (la plupart âgés) venus lui serrer la main et se rappeler des souvenirs de festival, d'interview... Il répond à tous, se plait à rester, les organisateurs s'impatientent, dehors la berline noire chauffe. C'est le premier que je vois ainsi trainasser, sourire. Claude Chabrol s'amuse. Une demi heure après il s'engouffre enfin dans sa voiture avec chauffeur. A côté de moi les badauds venus prendre les stars en photo me demandent qui c'est. "Claude Chabrol". Connaissent pas Ils prennent quand même la photo de ce réalisateur soit disant connu.

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