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lundi 16 février 2009

Ce qui restera de la 59e Berlinale...

Le tapis rouge a été roulé, la neige fine et drue a chassé les dernières stars de la Potsdamer Platz. C'est finalement une toute jeune cinéaste péruvienne, Claudia Llosa qui a emporté l'Ours d'Or avec "La testa Asustada" après une compétition plutôt maussade. Retour sur 10 jours de cinéma intensif où les meilleurs surprises ont eu lieu loin du tapis rouge.
Une compétition en demi-teinte
C'est une rengaine entendue chaque année auprès des festivaliers : la compétition berlinoise n'apporte pas l'excitation attendue. Les réalisateurs les plus connus, tels Stephen Frears, Bertrand Tavernier, Sally Potter ou François Ozon sont repartis sans rien. Les stars, Demi Moore, Michel Pfeiffer, ou Renée Zellweger ne semblent être apparues que pour le glamour. Avec son palmarès le jury a préféré souffler un "place aux jeunes", écartant les cinéastes de renom. Gigante et Alle Anderen, respectivement réalisés par l'argentin Adrian Biniez, 34 ans, et l'Allemande Maren Ade, 32 ans, ont reçu ex-aequo le prix du jury. L'ours d'argent du meilleur réalisateur a été attribué à l'Iranien, Asghar Farhadi, 36 ans. Quant à Claudia Llosa, la première cinéaste péruvienne à être récompensée à Berlin, qui a ému avec son film "La testa asustada" sur les violences faites aux femmes à l'époque du Sentier Lumineux au Pérou, elle n'a que... 32 ans ! Les Français repartent les mains vides, à l'exception de l'acteur Sotigui Kouyaté pour son interprétation dans London River de Rachid Bouchareb.
Quelques flops retentissants
Mammoth, le film le plus cher de l'histoire du cinéma suédois réalisé par Lukas Moodysson a été le seul film sifflé pendant les projections presse. Mais reste un des chouchous de Rafaël, allez comprendre! Et la présence du très glamour Gael Garcia Bernal n'y a rien changé, pas plus que la prestation de Jude Law en icône travesti de la mode n'a fait taire le flot de critiques sur Rage. Dans un exercice de style vain et prétentieux, Sally Potter, a fait fuir la moitié de la salle après les 20 premières minutes. Sur l'échelle de l'ennui elle arrive ex-aequo avec Forever Enthralled du chinois Chen Kaige.
Magie et espièglerie des anciens
Hors compétition les légendes du cinéma se portent bien, merci. Manuel de Oliveira, centenaire, 80 ans de cinéma derrière lui, est venu présenter sa dernière fantaisie gracieuse, Singularités d'une jeune fille blonde. Il parait qu'il est déjà reparti sur les plateaux pour terminer son nouveau film à temps pour Cannes! Claude Chabrol aussi s'amuse. A 78 ans, le réalisateur français a fait le bonheur des photographes à coups de grimaces et pirouettes et ravi les festivaliers avec son Bellamy porté par un Depardieu d'envergure, dans tous les sens du terme. Dust of time, de Theo Angelopoulos a beaucoup divisé la critique. C'est pourtant un film virtuose, d'une grande poésie que le maitre grec du cinéma a présenté à Berlin, servi par les magnifiques acteurs que sont Bruno Ganz, Michel Piccoli et Willem Dafoe. 
Les coups de coeur des sections Forum et Panorama
Ces deux sections ont l'avantage d'agir loin des paillettes et du strass, à quelques exceptions près. Parmi les dizaines de films présentés, voici quelques uns de nos coups de cœur. Nord tout d'abord, première fiction du norvégien Rune Denstad Langlo, qui est d'ailleurs reparti avec le prix Panorama de la critique Fipresci et le prix Europa Cinemas Label. Un road-movie sur motoneige pour soigner la dépression et revenir à la vie. Le cinéaste espagnol Roberto Aston a eu droit à des applaudissements nourris à la projection de son premier long métrage Ander, une sorte de Brokeback Mountain dans un village reculé du pays basque. Istanbul et les eaux du Bosphore offrent un écrin superbe au mélancolique film de Reha Erdem, Hayat Var, qui suit l'éveil brutal au monde adulte d'une gamine de 14 ans.
Des visions de l'Allemagne d'hier et d'aujourd'hui
"13 courts-métrages sur l'état de la nation" voilà le thème sur lequel ont travaillé 13 cinéastes allemands, dans le film collectif Deutschland 09 présenté en fin de semaine. Fatih Akin, Dominik Graf ou Tom Twyker présentent le visage d'une Allemagne sombre, en proie aux fantômes du passé, aux conséquences de l'ultra-libéralisme ou aux dérives ultra-sécuritaires. La Berlinale a également été l'occasion de découvrir des documentaires très personnels et loin de tout discours officiel, tournés de l'autre côté du mur. L'excellent Winter Adé de la réalisatrice Helke Misselwitz donne la parole à une foule de femmes de la RDA, ouvrières, fermières ou femmes au foyer, qui évoquent d'un ton très libre leur quotidien, leurs rêves. Dans la même veine, Sonnabend, Sontag, Montagfrüh de Hannes Schönemann, tourné en 1979, suit une bande de jeunes, le temps d'un week-end, dans les rues enneigées de Neuruppin. Le documentariste Thomas Heise, formé à l'école de l'est, est venu présenter deux films, dont l'iconoclaste Material où il rassemble des fragments d'images éparses tournées sur 20 ans, de la chute du mur à 2008.
Le Palmarès de la Berlinale 2009
Ours d'or "La testa asustada",Claudia Llosa, Peru
Grand Prix du Jury "Alle Anderen" de Maren Ade, Allemagne, ex-aequo avec "Gigante" de Adrian Bibiez, Uruguay
Mise en scène Asghar Farhadi "Darbareye Elly", Iran
Meilleure actrice, Birgit Minichmayr dans "Alle Anderen"
Meilleur acteur Sotigui Kouyate dans "London River"
Meilleur scénario Oren Moverman et Alessandra Camon pour "The Messenger"

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