Journal du bord du festival berlinois depuis 2008

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lundi 16 février 2009

Ce qui restera de la 59e Berlinale...

Le tapis rouge a été roulé, la neige fine et drue a chassé les dernières stars de la Potsdamer Platz. C'est finalement une toute jeune cinéaste péruvienne, Claudia Llosa qui a emporté l'Ours d'Or avec "La testa Asustada" après une compétition plutôt maussade. Retour sur 10 jours de cinéma intensif où les meilleurs surprises ont eu lieu loin du tapis rouge.

vendredi 13 février 2009

Ander

En ouvrant la projection, le jeune réalisateur espagnol Roberto Caston arrive à peine à parler. Il s'excuse "je suis très tendu. Mais j'espère que ce film saura vous toucher". Deux heures plus tard, applaudissements nourris. Le film est magnifique. Ce genre de film dont à la fin on ne se demande pas si on a aimé ou pas. Juste envie de faire passer notre admiration à l'équipe du film présente. Ander est un premier long métrage qu'on pourrait comparer rapidement à une version basque de Brokeback Mountain. Mais ce serait réducteur tant le film développe une esthétique toute différente.

jeudi 12 février 2009

London River

Je me suis souviens d'avoir été voir Indigènes un peu à reculons, en ayant peur d'un ton bien-pensant et moralisateur. J'avais été conquise, surprise. Avec London River, le petit dernier de Rachid Bouchareb, il s'est passé l'inverse. Grosse déception mardi matin lors de la projection. Visiblement a contrario de la critique, qui place London River en tête de la compétition de la Berlinale à mi-parcours.

Celui qui avait commis le clip de la Berlinale...

C'est le même chaque année. 30 secondes d'images digitales ringardos, un ours, des paillettes, et la musique entêtante, à base de synthés et de guitare électrique. Voici ce que les festivaliers écoutent obligatoirement avant chaque début de film depuis 2002. C'est signé M. Uli M Schüppel, réalisateur allemand, venu du monde musical, auteur de clips et de documentaires, qui a présenté cette année le réussi "Von Wegen" à la Berlinale. Du rock indus des années 80, au kitch et paillettes de la Berlinale. Cela s'appelle gérer sa carrière...
S.

Pauvre Demi Moore

Dans l'espace presse de l'hôtel Hyatt quand il y a foule devant l'écran qui diffuse les conférences de presse c'est qu'il y a star. Je m'approche. Demi Moore. De l'autre côté du mur du "Photocall" les flashs aveuglent et les photographe gueulent. Kate Winslet et Gael Garcia Bernal ont eu droit à ça aussi. Grand cirque vain et sans intérêt. Je repense à cet acteur suédois, Rolf Lassgard, reconnu dans la salle du Cinestar 3, venu regarder peinard "Milk" ou le réalisateur russe de "Rossiya 88" derrière moi dans la salle. Eux, les photographes les ont à peine regardés. Mais quand ils viennent à un festival il peuvent en profiter. Demi Moore ne peut pas faire ça. A Berlin, elle se contente de faire le singe devant les photographes, se fait belle pour la soirée, se fait traquer dans son hôtel et repart. Ce matin Raf a croisé les acteurs de "Dorfpunks" le film allemand qu'il venait de voir. Assis au café ils ont juste discuté, comme ça. Demi Moore, non plus peut pas aller prendre un café, comme ça.
S.

Von Wegen

Le mur n'est plus mais à Chekpoint Charlie, les Einztürzende Neubauten ont besoin de visa et de passeport pour passer de l'autre côté. A Berlin Est. 21 décembre 1989, le rideau de fer est tordu mais les deux Allemagnes existent toujours. On pourrait appeler ça un road-movie, un voyage de Kreuzberg à Lichtenberg, de l'ouest à l'est. Un trajet bouclé aujourd'hui en 40 minutes, qui prend au réalisateur presque deux heures.

Gigante

Une bonne surprise venue d'Argentine, un film minimal aux allures légères et anecdotiques qui l'air de rien donne un grand coup de pied à la société de consommation. Le géant c'est Jara (étonnant Horacio Camandule), chargé de la sécurité d'un supermarché, il vit presque invisible derrière les écrans qu'il surveille.

Food Inc., navrant

Dieter Kosslick, le directeur du festival, nous prévient dès la deuxième ligne de l'édito du programme : Food Inc. va déchirer, c'est LE FILM qui engage la Berlinale dans la voie de la contestation anti-mondialiste, etc etc. Eh, Dieter, il y a combien de temps que tu n'as pas ouvert un journal ? Plus grave, combien de films sur le sujet as-tu vu ? C'est fou de tomber des nues comme ça !

Ne me libérez pas, je m'en charge

Un jour Michel Vaujour a volé. Un petit larcin, mais de la taule ferme à la clé. De ces mois de taule à 18 ans, Michel Vaujour dit qu'ils ont été son "université". Il se fait la belle. Et puis il se fera rattraper. Il ne s'arrêtera plus de s'échapper. Au final 27 ans en prison, dont 17 au mitard, dans la solitude la plus totale et 5 escapades à faire pleurer les scénaristes de film de genre.

mercredi 11 février 2009

Mammoth

Je vais tenter un sauvetage de Mammoth, qui a été apparemment sifflé après la projection de presse, et se trouve bon dernier au classement de la presse allemande. Je n'ai toutefois pas élucidé si ce qui a dérangé ces critiques était le propos du film, ou sa forme. L'an dernier, les mêmes avaient vilipendé Tropa de Elite, qui est reparti avec un animal doré dans les pattes.

mardi 10 février 2009

Le côté clown de Chiara

Chiara Mastroianni a fait un saut de puce à Berlin pour présenter dans la section Forum la dernière comédie de Sophie Fillières "Un chat un chat" (voir critique de Raf). L'histoire d'une rencontre entre Célimène écrivain de 35 ans, en phase très transitoire, et Anaïs (Agathe Bonitzer, la fille de la réalisatrice) lycéenne entêtée et envahissante. Dans ce film verbe soigné, chaque réplique se déguste. Chiara Mastroianni s'y dévoile irrésistible et clownesque dans un registre qu'on ne lui connaissait pas. Je l'ai rencontrée dans les hauteurs de Potsdamer Platz, là où les attachées de presse sont reines et où les journalistes se plient à leurs désirs.

Hayat Var - The happiest girl in the world : cruautés adolescentes

Deux perles dénichées dans l'éclectique section Forum, "Cea mai fericita fata din lume" et "Hayat var". Les deux films n'ont rien en commun si ce n'est le thème : deux portraits de jeunes adolescentes découvrant la cruauté du monde. Théâtral pour le premier du Roumain Radu Jude, onirique pour le stanbouliote Reha Erdem, chacun porte une vision très personnelle et originale. Coups de cœur.

lundi 9 février 2009

Darbareye Elly

Seulement deux films iraniens cette année, un dans la section "forum", et Darbareye Elly -About Elly- en compétition. C'est un peu dommage puisque l'année passée "The song of sparrow" avait eu un très bon accueil, et avait valu un ours d'argent à son acteur principal, et qu'à cette occasion beaucoup espéraient une présence renforcée des très productifs iraniens.

Rage ô désespoir

C'était bien la peine d'ouvrir une troisième salle pour accueillir la foule de journalistes. C'était bien la peine de se bousculer. Vingt minutes après le début de Rage, le film de Sally Potter, cet après-midi, les premiers quittaient la salle. Moi je suis plutôt du genre à rester jusqu'à la fin. On ne sait jamais. Peut-être que tout avait un sens qui sera délivré dans les dix dernières minutes? Au bout de trois quarts d'heure c'est la moitié de la salle qui a fui.

Bellamy

Conformément à ses vœux que les dinosaures du cinéma soient écartés des compétitions officielles des festivals, le dernier né chabrolesque est présenté à Berlin dans la catégorie "spécial", hors course. Pour le beauté du geste d'être encore là, 50 ans après l'ours d'Or et Les Cousins. Ils ont fait pareil avec Angelopoulos, Costa Gavras, et le patriarche de Oliveira. Il se pourrait bien qu'ils aient quand même encore tous quelque chose à nous apprendre. Je ne saurais dire si Bellamy est un bon crû Chabrol, un bon film. C'est DU Chabrol, et cela suffit à me réjouir. Une histoire policière, familiale, romantique et banale. Une dose subtile aussi noire qu'aimable.

In the Electric Mist - Tavernier dans le bayou

Des eaux saumâtres du bayou émergent des cadavres de jeunes gilles dépecées et un squelette encore enchainé. Des fantômes aussi. Tour à tour ils vont croiser le chemin de Dave Robicheaux, le sheriff du coin, raviver sa mémoire, troubler sa vision manichéenne du monde. "In the Electric Mist" dégage un sentiment de désolation et de noirceur, adouci parfois par des blues électriques et des airs cajuns.

dimanche 8 février 2009

La classe selon Chabrol

Salle de conférence de presse, 20h30. Chabrol est seul sur le podium, face à une maigre poignée de journalistes. Il vient de jouer les clowns octogénaires devant les photographes, et ça a l'air de l'enchanter. Ce matin encore la salle était pleine à craquer pour Sturm, hier c'était la folie Kate Winslet venue présenter The Reader, on pouvait à peine rentrer. Il a pas l'air de s'en offusquer le réalisateur venu chercher son prix hommage, 50 ans après avoir gagné ici à Berlin avec "Les cousins". Pas de belle actrice sexy pour l'encadrer, pas d'acteur ténébreux, pas d'appât. Seulement ce petit bonhomme en imper, comme sorti de ses propres films, un peu voûté mais avec des yeux ronds comme des billes qu'il écarquille avec délice.

Little Soldier- Nord : deux pépites venues du Nord

La réalisatrice norvégienne Annette K. Olesen a ouvert la competition avec grande classe hier matin avec ‘The Little Soldier’ un portrait intimiste et violent d’une femme dévastée par son séjour sur le front, quelque part en Irak ou en Afghanistan. A coup sûr un bon candidat pour le palmarès. L’autre très bonne surprise nous vient d’un autre pays scandinave, la Norvège. "Nord" est le premier long métrage de fiction de Rune Denstad Langlo, un road movie imbibé sur motoneige.

samedi 7 février 2009

Ricky

Mais qu’avait donc en tête Francois Ozon en réalisant ce film ? Réponse de la bouche de l’intéressé : un mélange de fibre réaliste et de fantastique, une œuvre qui brouille les pistes, perturbe le spectateur, déroule un scénario aux orientations inattendues. Du social il ne plante que le décor, une barre d’immeubles, une usine, Katie, une mère élevant seule sa fille Lisa, et se recasant avec le premier venu qui lui taxe une cigarette, Paco. Pour le fantastique il y a Ricky, le bébé magique, qui ne parvient pas à nous faire décoller très haut de cette réalité. Du coup le brouillage de piste se résume en une histoire bancale qui ne choisit jamais son camp et tourne vite au ridicule. N'est pas Lynch qui veut.

Un chat un chat - la bonne surprise

"Un chat, un chat" de Sophie Fillières est un film qui dessine le portrait d'une femme perdue, écrivain en manque d'inspiration, en galère sentimentale et financière dans la petite bourgeoisie parisienne. De visites chez le psy en cours de danse classique, de rencontres fortuites dans des brasseries de boulevards en chassé-croisés de regard dans une rame de métro, on a l'impression qu'on connaît déjà le personnage, voire qu'on a déjà vu le film. Et pourtant : surprise !

jeudi 5 février 2009

Le retour

Pas de Rolling Stones ce soir sur le tapis rouge de la Berlinale, ni de Scorsese, même pas Naomi Watts la star du film d'ouverture de Tom Tykwer "The International". Il parait que la 59e Berlinale est en phase avec la crise. Pour le reste rien n'a changé. Le ciel poisse, bas, gris, épais. La chorégraphie des sacs rouges a repris aux pieds des tours, le salon de maquillage de l'Oréal a piqué sa place au mémorial des 20 ans de la Chute du mur sur Potsdamer Platz, les files s'allongent aux guichets. Et Berlinale Off reprend du service. A quatre mains toujours, voire plus.